Le régime végan est de plus en plus adopté pour diverses raisons, écologiques, sanitaires, économiques, sociales ou pour défense de la cause animale. En 2008 moins de 80 000 personnes suivaient un régime végan en Allemagne, ce nombre est passé à 1,58 millions en 2022 (1). En France les valeurs sont moindres et on estime que 0,3% de la population est végétalienne ou végan soit environ 200 000 français et les végétariens 1,3 millions, la consommation de viandes s’étant réduite de 12% en 10 ans (source CREDOC).
Il convient de différencier le régime végan constitué exclusivement de végétaux associés à un mode de vie excluant tout produit issu de l’exploitation animale, alors que le régime végétalien ne concerne que l’alimentation qui n’est que d’origine végétale et le régime végétarien est essentiellement végétal avec lait et œufs autorisés.
Ces régimes excluant l’apport d’aliments d’origine animale suscitent les craintes des nutritionnistes qui insistent sur une bonne éducation alimentaire pour éviter les carences et pour garder des apports équilibrés avec consommation quotidienne de légumineuses et de fruits à coque, de micronutriments (vitamines D et B12, riboflavine, métaux, iode, calcium, oméga 3 …), et apport suffisant de protéines de bonne qualité nutritive (légumineuses, soja, pommes de terre plutôt que céréales…).
Pour l’allergologue le régime végan peut aussi poser problème comme l’illustrent la récente communication de Christine Sauvage Delebarre lors du dernier congrès francophone d’allergologie (2) et un « position paper » sur le thème, publié en 2023 par la société allemande d’allergologie et d’immunologie clinique (1). Pour ces experts référents, il existe un parallèle à risques entre l’augmentation des allergies alimentaires aux allergènes végétaux et l’augmentation des régimes végans. Parmi les 10 aliments les plus fréquemment impliqués dans l’allergie alimentaire on trouve 7 végétaux avec en première place l’arachide suivie de la noisette. Ces régimes exposent d’avantage le consommateur à des risques d’allergie alimentaire d’autant plus que la nature des ingrédients dans les produits finis est souvent mal précisée. Lire la composition est plus que jamais essentielle même si de nombreuses formes de substituts des laitages ou des œufs contiennent des ingrédients qui n’ont pas encore classés comme potentiellement allergisants. D’autre part le label « végan » ne signifie pas « sans allergéne » et des contaminants sont possibles dans le processus de fabrication. Ainsi sur 30 produits chocolatés labelisés comme végans on a pu mettre en évidence des quantités de lait suffisantes pour déclencher des symptômes chez le patient allergique. Se retrancher derrière une étiquette « végan » n’est donc pas une sécurité pour le patient allergique souhaitant mettre en place un régime d’éviction.
Parmi les grands pourvoyeurs d’anaphylaxie chez l’adulte, les légumineuses (arachide, soja, lupin) occupent la première place, suivies par les fruits à coque (noisette, cajou, noix), les céréales (blé, sarrazin, maïs), les fruits (kiwi, pomme, pêche) puis le céleri, l’avocat, et les graines (sésame, tournesol, graines de citrouille). Ainsi plus on avance en âge plus les végétaux sont une cause fréquente d’anaphylaxie, et plus précisément ceux qui sont consommés dans le régime végan notamment les légumineuses et les fruits à coque. Des alternatives doivent donc être proposées évitant des régimes trop monotones et riches en allergènes.
Enfin le choix d’aliments ultra transformés n’est pas exempt de risques pour les experts. Ce marché est en expansion et les fournisseurs offrent une large gamme d’aliments industriels de type végan qui ressemblent délibérément à des aliments d’origine animale, en aspect, utilisation et goût. Habituellement ces aliments ultra transformés prêts à consommer contiennent de hauts niveaux de sel, de sucre et d’amidon, mais peu de protéines, de fibres et de micronutriments. Sur un plan immunoallergique il a été soupçonné que le manque de fibres alimentaires fermentescibles, de métabolites secondaires et d’autres ingrédients naturels d’origine végétale pourrait avoir un effet négatif sur le microbiome et la barrière intestinale avec des conséquences défavorables sur la réponse immunitaire.
1-Reese I. et al. Vegan diets from an allergy point of view-Position paper of the DGAKI working group on food allergy. Allergologie Select 2023 ;7 :57-83.
2-Sauvage Delebarre C. L’allergie alimentaire au-delà des croyances. Congrès Francophone d’Allergologie. Paris, palais des congrès, 16-19 avril 2024.