Du 20 au 27 février 2019, la région Île-de-France a été confrontée à un nouvel épisode de pollution. Les observations ont fait apparaître une concentration élevée en particules PM10, dont l’origine locale était liée dans une large proportion au trafic routier et dans une moindre proportion à la combustion du bois. Des conditions météorologiques anticycloniques (pas ou peu de vent, de fortes amplitudes thermiques matin et soir) ont entraîné un phénomène d’inversion. « Un couvercle d’air chaud qui empêche les polluants de se disperser, entraînant leur accumulation. Les Hauts de France, la Normandie et la région Auvergne – Rhône- Alpes ont connu également un tel épisode.
Quatre dépassements du niveau d’information et de recommandation des PM10 (50 µg/m3 en moyenne journalière) ont été observés les 20, 21, 22 et 27 février en Île-de-France. Le niveau d’alerte de 80 µg/m3 de PM10 n’a jamais été atteint. Face à cette situation, la Préfecture de police a mis en œuvre un plan d’urgence axé sur des mesures de réduction des émissions concernant les industries, la circulation (réduction de la vitesse maximale de 20 km/h) et l’utilisation du chauffage au bois. Ces mesures ont été effectives depuis vendredi 22 février et ont été conservées les jours suivants.
Une polémique s’est alors installée entre la Mairie de Paris et l’Etat au sujet de la mise en place de la circulation différenciée qui ne devrait intervenir que lorsque le niveau d’alerte est dépassé ou en cas de persistance de l’épisode de pollution, selon l’arrêté inter-préfectoral du 19 décembre 2016. L’exclusion de la circulation des véhicules les plus polluants, munis d’une vignette Crit’Air 4 et 5 et non classés, a été décidée pour le mercredi 27 février dans le périmètre délimité par l’A86.
Une « bataille de seuils », entre l’urgence sanitaire et la réglementation.
Il faut rappeler ici les premiers résultats du programme Erpurs, (Evaluation des risques de la pollution urbaine sur la santé), publiés en 1994 par l’Observatoire régional de santé d’Ile-de-France (Medina S, Le Tertre A, Quenel P, Le Moullec Y. Impact de la pollution atmosphérique sur la santé en Île-de-France: résultats 1987-1992.Paris : ORS Île-de-France. 1994. 103 p.). Ils ont permis de rendre compte des liens observés entre les indicateurs de pollution atmosphérique urbaine et les indicateurs de santé. Mais surtout les résultats d’Erpurs ont souligné que les effets mis en évidence sont observés dès les plus faibles niveaux de pollution (relation linéaire sans seuil), même lorsqu’ils sont inférieurs aux recommandations de l’OMS.
Ces épisodes de pollution frappent en priorité les populations vulnérables (femmes enceintes, nourrissons et enfants de moins de 5 ans, personnes de plus de 65 ans, sujets asthmatiques, souffrant de pathologies cardiovasculaires , insuffisants respiratoires ou cardiaques), mais aussi les personnes se reconnaissant comme sensibles lors des pics de pollution et/ou dont les symptômes apparaissent ou sont amplifiés lors des pics de pollution, par exemple personnes diabétiques, immunodéprimées, souffrant d’affections neurologiques ou à risque cardiaque, respiratoire, infectieux.
Ceux qui ne respectent pas les limitations de vitesse lors des pics de pollution, ceux qui prennent leur véhicule interdit en cas de circulation différenciée devraient penser quelques instants à ceux qui souffrent de la pollution de l’air. Les petits ruisseaux font les grandes rivières !
Fabien Squinazi
Président du collège d’experts