À l’heure où ces lignes sont écrites, la conférence de Glasgow ne fait que commencer. Mais, ce qui s’y passe, l’attitude des différents acteurs, État, collectivités territoriales, O.N.G., l’océan qui sépare la connaissance que nous avons de la réalité du risque vital auquel nous somme confrontée et la capacité que nous avons à changer nos addictions mérite la réflexion. En effet, ce qui se passe pour le climat est vrai pour la biodiversité et pour la santé. Les sujets sont désormais planétaires autant que locaux .Cela signifie que les actions nationales et territoriales restent essentielles mais qu’elles peuvent être ruinées par l’inaction ou les actions contraires d’autres pays. C’est une évidence pour le climat puisque l’absence de la Chine responsable de 22% des émissions planétaires rend très aléatoire un réel progrès à Glasgow.
Pour la biodiversité, certes les destructions des espèces peuvent être localisées mais la 6éme extinction est planétaire ; les espèces invasives qui mettent en péril nos oliviers ou la faune aquatique , la sécheresse qui font disparaitre nos forêts sont autant d’exemples des limites de l’action locale.
Pour la santé, il en a de même. Certes les malades sont soignés là où ils vivent, mais la pandémie ne connait pas les frontières. La propagation du moustique Aedes dans des zones jusque là tempérées introduit la dengue ou le chikungunya ; la déforestation et la proximité des espèces sauvages et domestiques multiplient les zoonoses qui peuvent se transmettre à l’homme et touchés des humains très éloignés des zones initiales de contamination.
Autrement dit, nous n’avons jamais sans doute été aussi tributaires les uns des autres, mais aussi d’une certaine manière aussi démunis pour agir efficacement ne serait ce que parce que la tâche parait si immense et peu promise au succès que l’éco-anxiété devient une maladie des temps présents, risque supplémentaire de sombrer dans le déni du danger, comportement promu par nombre d’intérêts économiques qui vivent de la rente de l’utilisation sans borne des ressources communes
A l’opposé de ce comportement, celui qu’a adopté la jeunesse du monde entier sur le climat est une excellente illustration du nouveau rôle que joue la société civile. Une mobilisation organisée et orchestrée pour faire pression sur les gouvernements ; la généralisation de la justice climatique qui, à travers 2000 procès menés dans le monde entier par des collectivités publiques des associations et des citoyens visent à faire imposer par les juges le respect des engagements pris et le respect du principe fondamental du droit à la vie à la santé ; la multiplication d’actions concrètes menées dans le monde entier par des communautés, des villes, des entreprises, des agriculteurs, des jeunes, des anciens pour changer des modes de production et de consommation et obtenir des succès indéniables que les réseaux sociaux permettent désormais de partager.
Il faut penser notre monde différemment et ce qui est fait pour le climat, doit pouvoir être fait pour la santé. La prévention est en effet un axe majeur pour lequel toute la population peut se mobiliser à la condition d’avoir des objectifs précis. Le développement de la justice sanitaire, sur le modèle de la justice climatique en particulier en ce qui concerne les pesticides, est un autre exemple d’action coordonnée de la société civile. Ce qui est vrai au niveau international l’est également au niveau national.
Les changements politiques publics absolument indispensables en matière de santé publique, qu’il s’agisse du suivi de l’état sanitaire la population (comme par exemple des registres de malformations congénitales ,de cancers et d’autres pathologies), de la lutte contre la désertification médicale ou de l’application des règles de lutte contre la pollution atmosphérique . Tous ces sujets ne sont pas traités ou mal traités à l’échelle étatique sont pris en charge aujourd’hui par le monde associatif devant les tribunaux. Et que dire de l’hôpital public et de notre système de soins en général , de l’état de délabrement dans lequel il se trouve, de la situation tout à fait anormale du personnel de soins, médecins y compris. Sortir de la vision technocratique dans laquelle le dernier demi-siècle nous a enfermé ne pourra se faire qu’avec la compréhension du Nouveau Monde dans laquelle nous sommes entrés et du rôle majeur que peut y jouer la société civile c’est-à-dire chacun d’entre nous pour peu qu’il y ait la volonté, la coordination des actions et une vision partagée du futur souhaitable pour chacun d’entre nous comme pour le grand Nous constitue aujourd’hui l’humanité.