Chaque année, l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) publie son rapport sur la qualité de l’air. Pour sa dixième édition, l’AEE montre qu’entre 2009 (année du premier rapport) et 2018 (année pour laquelle les dernières données sont disponibles), le nombre de décès prématurés (avant l’âge de l’espérance de vie), liés à l’exposition aux particules fines a diminué d’environ 60 000 en dix ans à l’échelle du continent. Selon les estimations de l’AEE, en 2018, les particules fines ont été à l’origine de 417 000 décès prématurés dans l’ensemble des 41 pays européens dont 379 000 au sein des 28 Etats membres de l’Union européenne (UE) contre 477 000 en 2009. Par pays, c’est l’Allemagne (nation la plus peuplée de l’UE) qui continue à payer le plus lourd tribut, avec environ 63 100 décès par an, devant l’Italie (52 300), la Pologne (46 300) et la France (33 100).
Cette nouvelle « rassurante » ne doit pas cependant occulter l’essentiel : la grande majorité des Européens continuent à respirer un air dangereux pour leur santé. Et en particulier les citadins. Selon les estimations, de l’AEE pour l’année 2018, les trois quarts de la population urbaine de l’UE (environ 77 %) sont exposés à des niveaux de particules fines qui dépassent les normes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), soit 10 microgrammes/mètre cube (µg/m3) en concentration annuelle. Les données ont été relevées par plus de 4 000 stations de mesures, situées pour l’essentiel en milieu urbain, là où les populations sont le plus densément soumises aux effets de la pollution et des multiples sources : trafic routier, chauffage, industrie… Hormis l’Estonie, la Finlande, l’Islande et l’Irlande, aucun pays ne respecte les valeurs guides de l’OMS. Pire, six Etats membres (Bulgarie, Roumanie, Croatie, République Tchèque, Pologne et Italie) dépassent même la limite communautaire, pourtant beaucoup moins stricte que celle de l’OMS.
Dans une étude publiée en 2019 dans l’European Heart Journal une équipe de chercheurs allemands de l’Institut Max Planck a revu à la hausse le bilan de la pollution de l’air. Les particules fines seraient à l’origine d’environ 800 000 morts prématurées en Europe chaque année, soit le double de l’estimation de l’AEE. Rapporté à la France, le nombre de morts prématurées imputables à une mauvaise qualité de l’air serait de 67 000. Beaucoup plus que l’estimation de 48 000 morts retenue depuis quelques années par Santé publique France et reprise dans toutes les communications officielles. Dans une autre étude internationale, publiée en octobre dans la revue Cardiovascular Research, les mêmes auteurs estiment qu’environ 19 % des décès en Europe dus au Covid-19 pourraient être attribués à une exposition à long terme aux particules fines. Dans son rapport, l’AEE relève que la pollution de l’air provoque des maladies cardio-vasculaires et respiratoires, qui ont toutes deux été identifiées comme des facteurs de risque de décès chez les patients atteints du Covid-19.
La France, mais également l’Italie ou l’Allemagne, sont actuellement poursuivies devant la Cour de justice de l’Union européenne pour enfreindre depuis plus de dix ans les lois européennes en matière de qualité de l’air…